DOSSIER : Outreau : anatomie d'une aberration judiciaire

Présentation

L’affaire d’Outreau n’a pas été une simple « erreur » judiciaire : au-delà des défaillances d’un juge et des dysfonctionnements circonstanciels de l’institution, elle a constitué une véritable aberration judiciaire. La commission parlementaire a fait son travail et remis ses conclusions. Le sujet n’est pas épuisé pour autant. Après le constat, l’heure est venue des analyses en profondeur. Il reste à scruter ce que ce terrible révélateur a porté au jour, que ce soit du côté des impensés du travail social, du côté des attentes investies dans le pouvoir de juger, du côté de l’obscurantisme militant des médias ou du côté des fantasmes collectifs mobilisés par la pédophilie. C’est à un premier examen des problèmes soulevés par ce cas d’école que s’emploient les études réunies ici.

Dans un événement monstre comme celui-là, tout conflue. L’époque entière s’y réfracte. Denis Salas reconstitue la physionomie que renvoie le miroir judiciaire.

Comment l’institution judiciaire a-t-elle pu permettre un tel dévoiement, si l’on admet que quelques fautes personnelles ne suffisent pas à l’expliquer ? Jean de Maillard avance l’hypothèse qu’il est la rançon d’un mode de fonctionnement supposé rendre l’institution plus efficace.

Le rapprochement avec les procès de sorcellerie s’est aussitôt imposé, le réseau pédophile ayant simplement remplacé le pacte avec le diable. Robert Muchembled explore le parallèle, en connaisseur, et montre comment le renouvellement des thèmes n’empêche pas l’inquiétante permanence de certains mécanismes psycho-sociaux.

Puisque l’émotion suscitée par l’affaire a remis une fois de plus la réforme de la justice à l’ordre du jour, c’était l’occasion de demander à notre ami Robert Badinter son avis sur l’état de l’institution, sur l’évolution de la demande sociale à son égard depuis trente ans et sur les conditions d’une réforme qui serait enfin stabilisatrice. Nous le remercions chaleureusement de nous avoir confié son diagnostic.

Nous joignons au dossier, à titre d’instrument de travail, une chronologie de l’affaire établie par Bénédicte Vergez-Chaignon.

Autres articles du dossier Outreau : anatomie d'une aberration judiciaire