DOSSIER : Mémoires du communisme dans l'ex-Union soviétique Présentation |
On a de la peine à se représenter à la fois le poids écrasant du passé communiste dans le monde ex-soviétique et l’extrême difficulté de nouer un rapport collectif maîtrisé avec lui. Les trois articles réunis ici introduisent dans le vif de cette épreuve.
Les deux premiers sont relatifs à la Russie et à l’œuvre de « Memorial », l’association créée en 1988 afin de tirer de l’ombre l’histoire de la terreur stalinienne et le souvenir de ses victimes. Le texte d’Arseni Roginski, son fondateur et animateur, a en lui-même une histoire éloquente. Il reprend sa communication au premier colloque international sur l’histoire du stalinisme qui s’est tenu à Moscou en décembre 2008, en dépit des entraves apportées par les autorités du Kremlin. La veille du colloque, les policiers du FSB ont fait irruption au siège de Memorial à Saint-Pétersbourg et ont saisi une partie de ses archives, notamment les archives du musée virtuel du Goulag (matériaux qui n’ont, bien sûr, pas été restitués). Comme quoi le pouvoir « post-soviétique » conserve d’étranges accointances avec les ancêtres dont il prétend se distancier. Cette mésaventure en dit long sur les obstacles auxquels l’entreprise est en butte. Maria Ferretti revient parallèlement sur le parcours et la signification de cette œuvre courageuse que nous avons plaisir à saluer.
Le cas de l’Ukraine, analysé par Olha Ostriitchouk Zazulya, nous entraîne dans des complexités supplémentaires, dues à l’interférence des souvenirs traumatiques du stalinisme (la famine des années 1930) avec la renaissance d’une identité nationale indépendante. La « concurrence des victimes » trouve, dans cette situation, une illustration de choix.
Autres articles du dossier Mémoires du communisme dans l'ex-Union soviétique
- Arseni Roginski, « Mémoire du stalinisme », p. 119-130
- Maria Ferretti, « Memorial : combat pour l'histoire, combat pour la mémoire en Russie », p. 131-140
- Olha Ostriitchouk Zazulya, « Des victimes du stalinisme à la nation victime », p. 141-151