Il n’y a pas plus d’« impérialisme américain » que de « guerre au terrorisme ». Le langage du gouvernement américain est aussi trompeur, à cet égard, que celui de ses détracteurs. Il n’y a pas plus urgent, par rapport à ces formules sonores et vides qui brouillent le débat public, que de retourner à l’examen des réalités qu’elles travestissent. Quoi qu’on pense de la politique des États-Unis et de l’attitude appropriée devant les terroristes en chair et en os, la première des exigences est de les aborder avec les mots justes sans lesquels il n’y aura pas d’action efficace. C’est à leur recherche que s’emploient les trois études réunies ici.
De quoi parle-t-on lorsqu’on parle d’« empire » et d’« impérialisme » ? La prééminence des États-Unis, la politique de puissance qu’ils mènent, leur visée d’hégémonie suffisent-elles à les constituer en empire? Tony Judt dresse un bilan critique des nombreux travaux qui ont été consacrés récemment à la stratégie américaine et à la bonne manière de la définir. Il fait ressortir les tensions entre ce qui rapproche les États-Unis d’une posture impérialiste et ce qui les en éloigne.
Laurent Murawiec remonte à la source toujours vive des abus de langage d’aujourd’hui : la théorie léniniste de l’impérialisme. Il s’attache à montrer la nouveauté de la situation qui est la nôtre au regard du modèle de l’empire tel qu’il se dégage des exemples de l’histoire. Il plaide pour une terminologie appropriée à cette nouveauté.
Qu’est-ce que la guerre ? Qu’est-ce que le terrorisme ? Philippe Moreau Defarges revient sur la définition de ces termes emportés par l’inflation médiatique et rendus méconnaissables par leur charge émotionnelle. L’exercice de rigueur conceptuelle mène loin, en la circonstance, puisqu’il met en lumière l’inadéquation d’une politique qui à vouloir tout embrasser n’étreint qu’un fantôme.
Articles du dossier « Impérialisme américain » et « guerre au terrorisme » : de l'usage des mots
- Tony Judt, « Rêves d'empire »
- Laurent Murawiec, « Empire ? Quel Empire ? »
- Philippe Moreau Defarges, « Terreur, terrorisme, guerre »