À l’heure de la «société de la connaissance», les universités et la recherche sont devenues des priorités publiques. On en attend des résultats. Cette pression n’aide pas, c’est un euphémisme, à poser les vraies questions auxquelles elles sont confrontées.
Elle conduit, pour commencer, à escamoter la question des fnalités – on sait pour elles à quoi elles doivent servir. Or ce devrait être l’occasion, au contraire, de repenser leur fonction, comme le souligne Keith Thomas, l’un des plus grands historiens britanniques.
Les grandes perdantes de cette configuration utilitaire sont naturellement les sciences humaines et sociales. Il faut dire qu’elles subissent cet assaut externe à un moment où elles sont en proie à un profond malaise interne. Ce devrait être une raison de plus pour mettre cette situation de crise en tête de l’agenda intellectuel. Krzysztof Pomian ouvre la discussion en analysant les causes de ce marasme.
Les sciences dures, en revanche, ont la part belle dans le nouveau paysage. C’est d’elles avant tout que l’on attend des retombées économiques, et l’on ne leur marchande pas les moyens. Il n’est pas sûr, pour autant, que cette position privilégiée soit toujours bonne conseillère en matière de démarche théorique. Il a été fait grand bruit, ainsi, des merveilles à attendre du lhc récemment mis en service à Genève. Est-ce si sûr? Est-ce vraiment à coups de «grands équipements» que la science avance, demande Freeman J. Dyson? Le problème, on l’avouera, mérite au moins l’examen.
Comme quoi, dans le débat public comme dans la science, la qualité des résultats dépend de la pertinence des questions posées.
Articles du dossier Recherche et politique de la recherche
- Keith Thomas, « À quoi servent les universités? »
- Krzysztof Pomian, « Sciences humaines, sciences sociales : crise ou déclin ? »
- Freeman J. Dyson, « Un grand saut dans l'inconnu microphysique »